POSE DE LA 1ère PIERRE en 1921 ou 1922

POSE DE LA 1ère pierre du MONUMENT AUX MORTS des TROIS-MARABOUTS en 1921 ou 1922".

 

Texte écrit par Pierre PIGUET et lu par Marcel ESQUERDO au cours de la Rencontre constitutive de l'Amicale des Trois-Marabouts le 22 mai 1988 au Domaine de Deffend à LAMANON.

 

« Depuis quelques jours, on creusait un grand trou carré, comme une cuve, juste devant l’église. Et puis un matin le maître, Mr BARIDON, nous dit qu’on allait assister à la cérémonie de la pose de la première pierre.

Après la récréation, en rang et au lieu de monter les marches de la classe, c’est en avant par le portail que le maître nous conduisit devant le fameux trou. Là, il y avait déjà pas mal de monde endimanché, et au fond du trou, trois personnes : le maçon Alexis BARIDON, le cantonnier Père LESCALIER et le vieux Père COINDARD. Discours devant cette fosse : c’est la pose de la première pierre  du futur monument aux morts  de la guerre.

Avec la logique du monde colon, la première pierre c’est bien la première, donc la première  des fondations. Le maçon commence à gâcher son mortier dans la « gamatte », avec sa truelle il en dépose un bon petit paquet bien dans le coin, se relève, prend une grosse pierre dégrossie en parallélépipède, la passe au Père COINDARD qui, à son tour, vient la poser et la stabiliser dans le coin sur le mortier.

Puis tout le monde ressort du trou et c’est la dispersion générale. Nous, en rang, retour à l’école. Une fois dans la classe, l’instituteur nous fit une petite leçon explicative sur la signification de la cérémonie et nous dit notamment pourquoi Monsieur COINDARD avait été choisi : parce qu’il était un vétéran de la guerre de 1870.

Et moi, gamin de 13-14 ans, cela m’a particulièrement frappé, je n’arrivais pas à réaliser qu’un soldat d’une guerre qui se trouve dans le livre d’histoire puisse être encore de ce monde (nos livres d’Histoire s’arrêtaient à la guerre de 1870 et à l’avènement de la IIIème République). »

 

Merci à Pierre PIGUET pour cette belle histoire et avis aux amateurs pour la prochaine !

 

Bien Amicalement

Marcel ESQUERDO 

 

Monument aux Morts des Trois-Marabouts (Joseph Martinez)

 

Voilà  des plus beaux souvenirs pour moi de ce lieu.

 

Ce sont tous les 14 Juillet et 11 Novembre, qui étaient ceux où l’on allait déposer une gerbe de fleurs au monument aux morts, cela  plaisait beaucoup aux jeunes de mon âge, car nous faisions une haie d’honneur aux personnalités de la commune et surtout à Mr le Maire, qui, très digne, déposait sa gerbe, après la sonnerie aux morts à la trompette ou au piston jouée par Mr Jean-Pierre Martinez.  Puis comme un chef orchestre, le maître, les bras levés en l’air, nous faisait chanter la Marseillaise, qu’un grand nombre de personnes aujourd’hui ne connait pas. Après cette cérémonie, le rendez-vous était au bar pour poursuivre les discutions avec les anciens de 14-18. 

 

 Mais un souvenir qui m’a beaucoup marqué,  me reste en mémoire : c’était en 1936 le 11 Novembre, pour la dépose de la gerbe par Mr le Maire au monument aux morts du village. Mon maître d’école m’a désigné pour lire à haute voix les noms des soldats des Trois-Marabouts tombés au champ d’honneur, et un autre élève devait après chaque nom de soldat dire à haute voix lui aussi : « mort pour la France ». Il me semble que c’était Camille Lescalier. Ce jour là, j’avais la gorge serrée, les noms des soldats morts me sortaient assez difficilement, mais des larmes coulaient sur mes joues ainsi qu’a Camille.

Le monument aux morts des Trois-Marabouts était devant l’église face à la mairie, depuis son inauguration jusqu’en 1958, où le conseil municipal décida de le déplacer devant l’école des garçons à gauche de la mairie, légèrement en biais faisant face à l’église

  

Mais après Juillet 1962, le socle fut démoli et le Poilu fut descendu au cimetière européen du village, sous les cyprès entre les tombes de nos morts, ainsi que la plaque où étaient inscrits les noms de tous nos morts de la guerre de 14-18 tombés au champ d’honneur.

 

Les morts en 14-18

 

Bails Jules           Lopez Manuel

Bails J-Pierre      Lopez Emile

Bails J- Antoine  Meunier François

Baridon  Prosper  Richier Charles

Berdu Antoine    Ponsenard Charles

Caron Baptiste    Ruiz Jean

Guigue Henri      Reymond Théodore

Hermann Louis   Soler Jacques

Herréro Jean       Soler Antoine

Plus dix noms dont je ne me souviens pas

 

Suite à ma dernière visite aux Trois-Marabouts, ayant vu le Poilu dans le cimetière, une idée me vint à l’esprit : faire venir le Poilu en France.

 

En 2005, je sollicitai le député maire de mon arrondissement Mr Bruno Gilles afin de rapatrier le Poilu des Trois-Marabouts, qui appartient au patrimoine Français resté là-bas, pour embellir la place de notre quartier ; les jours passèrent et restèrent sans réponse. Je pensais que Mr le Maire m’avait dit qu’il ferait son possible pour rapatrier le Poilu, parce que c’était en période électorale ; mais  Mr le Maire avait bien fait suivre mon courrier jusqu’au Ministre des Combattants. Mais, le Poilu des Trois-Marabouts se trouvait à Oran.

Après plusieurs recherches et renseignements ; j’appris que le 7 Novembre 1989, sur l’intervention de Mr Francis Ségura professeur en coopération au lycée technique de Tlemcen, le poilu quittait les Trois-Marabouts sur un camion d’une société espagnole pour trouver refuge à l’entrée de la nécropole du petit lac à Oran. Il demeure actuellement dans un site de huit hectares où plus de 10.000 tombes militaires Français reposent ainsi qu’un carré militaire  britannique. 

Par lettre du ministre délégué aux anciens combattants, le ministre des anciens combattants me confirma que cette statue était l’un des rares monuments aux morts conservé en Algérie.

 

Il ornait l’esplanade d’où partaient les allées conduisant vers les tombes à l’intérieur de la nécropole du petit lac d’Oran.

 

Une inspection sur place avait permis de constater qu’un nouveau déplacement risquait de lui être préjudiciable. Il paraissait donc plus judicieux de laisser cet ultime témoignage dans le cadre protégé où il se trouve actuellement.

 

Je suggère à ceux de nos adhérents qui se rendraient en Algérie, de faire un détour par ce lieu pour un dernier adieu au Poilu des Trois-Marabouts.     Joseph .Martinez

 

La dernière fois où j’ai revu ma maison natale

La mairie, l’école, le monument aux morts

Et le petit jardin qui l’entourait d’arbres et de fleurs,

Une part de mon âme d’enfant est restée en ces lieux,

Là où actuellement vivent beaucoup d’enfants rieurs.

 Nul ne leur avait dit que dans ce village

Une humble demeure chaleureuse avait été mon nid.

Et quand je m’éloignais, tournant souvent la tête,

Ils parlaient très haut, et j’entendis ceci :

« Ce vieux là pourquoi donc vient-il pleurer ici? »

Joseph Martinez